Tout d’abord, merci de nous donner à mon frère et à moi l’occasion de vous faire partager cette belle histoire qui nous unit autour de la greffe intrafamiliale. Je suis née avec une hypoplasie rénale bilatérale,maladie avec laquelle j’allais devoir grandir et on le savait, qui nécessiterait sûrement une greffe, un jour.
J’ai vécu « normalement » jusqu’à l’âge de 11 ans où effectivement, il était question de dialyse et de greffe. Et là, sans le savoir, je me lançais dans le grand tourbillon des médecins, des hôpitaux et desmoments difficiles. Cette première greffe a été permise grâce à un don, un « oui » de la part d’une famille à laquelle je pense encore souvent, plus de 12années après. Malheureusement, les suites de cette greffe furent tumultueuses, ponctuées de rejets et d’hospitalisations avec des hauts, mais surtout des bas. Le gros point noir de ces années de galère et ce qui nous a angoissés le plus, c’est l’apparition de tumeurs pré-cancereuses, à deux reprises ayant nécessité de lourdes interventions chirurgicales et de la chimiothérapie. Un lien avec les anti-rejets ? On n’en savait, apparemment, rien.
J’étais ado à l’époque et ma famille aux premières loges, impuissante, me soutenait comme elle le pouvait.
En 2005, presque 6 ans après la greffe, je retournais en hémodialyse pour une durée indéterminée.Un jour, pendant une consultation, on fait le point avec ma néphrologue. Je ne pouvais pas être greffée à partir d’un don anonyme car trop d’anti-rejets et donc trop de risques de récidiver les tumeurs qui avaient noirci ma première transplantation.La seule solution était qu’un membre de ma famille me fasse don d’un rein pour que le traitement anti-rejet soit le plus léger possible. C’était ça ou la dialyse. Ma première réaction, dans son bureau, fut un« non » catégorique. Je ne concevais pas qu’un être cher se « sacrifie » pour moi. Ce sont mes parents qui ont annoncé cette éventualité à la fratrie, pendant que l’idée faisait sonchemin dans ma tête, jusqu’à l’accepter.
J’ai la chance d’avoir trois frères et une soeur avec qui je noue une grande complicité, depuis toujours. Ils n’ont pas hésité longtemps pour donner leur accord afin de commencer les tests de compatibilité.
Et là, la machine était lancée. Quelques semaines plus tard, le résultat est annoncé: Gauthier est l’heureux élu, HLA identique ! Et là, les examens médicaux et démarches administratives, notamment le fameux passage au tribunal, se sont enchaînés pour Gauthier, pendant que je continuais péniblement la dialyse.
Pendant ces deux années de préparation, notre complicité est restée intacte, tout en lui rappelant à tout moment, qu’il pouvait encore dire « non ».
Le 26 juin 2007, il maintenu son « oui » en me faisant ce merveilleux cadeau. Je me rappelle en particulier de l’émotion et du soulagement que j’ai ressentis en salle de réveil, à côté de lui, en nous voyant tous les deux et en voyant ma poche urinaire se remplir !
Notre famille était là à notre retour de bloc, j’en garde un très bon souvenir. Très vite, la greffe fut un succès et le séjour post-greffe fut pour moi une renaissance et une période où j’ai pu vivre plein de bons moments avec mon frère.
Nous voilà tous les deux réunis 4 ans et demi après la greffe. Il est kiné, vient de se marier et en bonne santé. Je suis sage femme dans un an et en pleine forme. Aujourd’hui, je croque la vie à pleines dents et c’est à lui que je le dois.