LegendreL’AIRG-France a pensé qu’il serait utile de  poser 3 questions  au Pr Legendre avant notre journée annuelle du 7 décembre prochain au cours de laquelle il intervient sur le don d’organes entre vivants , le don croisé et la nouvelle loi de bioéthique.

AIRG-France : Cher Professeur Christophe Legendre, comment aller au delà  de la modestie et de la retenue naturelle des donneurs  vivants pour valoriser leur geste ?

CH. LEGENDRE : . Les différentes enquêtes démontrent clairement, et ce dans la grande majorité des pays, que le don de rein à un proche est un geste qui est valorisant pour le donneur, qui augmente l’estime de soi et ce, chez plus de 95% des donneurs. Il n’y a donc pas à mon avis à valoriser d’avantage le donneur . En revanche, il est important d’essayer de parvenir au fait que les donneurs aient bien compris pourquoi ils donnent, afin de ne pas avoir de mauvaise surprise après le don.

C’est le travail conjoint des équipes médicales, paramédicales et des psychologues d’aider dans le mesure du possible les donneurs à réfléchir plus en profondeur à leur choix et à leurs motivations. Il est aussi important que le parcours du donneur soit le plus simplifié possible, que la prise en charge de ses frais soit efficace, qu’il puisse bénéficier d’une chambre seule, qu’il soit l’objet de l’attention des soignants, bref qu’il ne se sente pas dévalorisé par ses conditions d’hospitalisation ce qui n’est pas toujours simple dans les conditions actuelles à l’hôpital. Là encore, ce doit être une préoccupation des équipes pour entretenir la flamme!

 

 

AIRG-France : Que penser du nouvel anti rejet  « BELATACEPT » ?

 

CH LEGENDRE : Le belatacept est un immunosuppresseur original et innovant pour plusieurs raisons. La première est son mode d’action: il bloque un signal dit de co-stimulation qui empêche le lymphocyte T d’entrer dans une état d’activation. La seconde est son administration par voie intra-veineuse à intervalles réguliers ce qui, on l’espère du moins, devrait améliorer l’adhésion du patient à son traitement. Troisièmement, cette molécule n’est absolument pas néphrotoxique ce qui a un intérêt évident pour les résultats de la transplantation rénale à long terme. Enfin, bien que cela ne soit pas encore formellement démontré, il y a des arguments pour penser que cette molécule aura un effet positif sur les complications cardio-vasculaires et le diabète post-transplantation. En revanche, aucune diminution des infections n’a été notée et une incidence accrue de syndromes lymphoprolifératifs a été notée ce qui restreint l’utilisation de ce traitement aux patients qui ont déjà été en contact avec le virus EBV. Ce traitement a reçu l’Autorisation de Mise sur le Marché mais pas de prix définitif ce qui fait qu’il est utilisé en France chez très peu de patients. c’est sans nul doute une molécule d’avenir.

AIRG-France : Que peut faire l’AIRG-France  pour la promotion du Don d’Organes après la journée du 17 octobre ?

Ch. LEGENDRE : Question difficile car c’est la question que tout le monde se pose et à laquelle, il n’y a pas de réponse simple. Le plus efficace en ce qui concerne le prélèvement sur donneur décédé est probablement d’en parler, de délivrer une information la plus claire possible, d’éviter les zones d’ombre et d’inciter nos concitoyens à en parler en famille, entre amis comme un sujet non tabou. Ce n’est qu’en augmentant progressivement le niveau d’information de la population que ce sujet pourra être abordé plus sereinement le cas échéant.

En ce qui concerne les donneurs vivants, là encore c’est l’information réitérée qui compte. C’est ou cela doit être le travail du néphrologue bien en amont de la transplantation, d’informer, d’expliquer, d’éviter les craintes qui n’ont pas lieu d’être et au contraire de parler des risques éventuels, minimes mais non nuls. Il est crucial que chacun puisse se déterminer là encore le plus sereinement possible et pas au dernier moment. Le chemin est encore long.

 

Merci, Professeur, nous serons heureux d’assister à votre intervention le 7 décembre prochain. 

 

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* Le Pr. Legendre est Chef du service de Néphrologie de l’hôpital Necker. Auteur de plus de 200 articles internationaux concernant différents aspects de la transplantation rénale (évaluation des immunosuppresseurs, maladies virales [CMV, hépatites B et C, HHV-8], individualisation de l’immunosuppression, histologie du rein transplanté), il est membre du Conseil d’Administration de l’Agence de la Biomédecine depuis 2005 et éditeur associé de l’American Journal of Transplantation. Depuis octobre 2007, Christophe Legendre est également directeur scientifique de la fondation CENTAURE